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Pas très loin de Tiken Jah Fakoly, ni de Loco Locass, le musicien et rappeur sénégalais Didier Awadi propose un reggae très engagé, très politisé, très acerbe envers la situation mondiale. On l’entend notamment défendre ses frères combattants, peu importe où ils sont en Afrique ou en Haïti. Awadi peut même compter sur la méga vedette Wyclef Jean (ex-Fugees et ex-candidat refusé à la présidence haïtienne) sur la pièce Ce qu’ils disent.

Trait commun : l’engagement social et politique. À la différence de Tiken Jah Fakoly qui éduque son public, Awadi s’adresse à des auditeurs déjà bien au fait des agissements crapuleux des décideurs mondiaux. Ça donne le parfois d’étranges résultats: de joyeux reggae (musicalement) et de propos lourds, sérieux et engagés (Coup d’État démocratique ou l’excellente S.O.S. Congo).

Plus riche que le hip-hop de base grâce à de plus fortes mélodies et des arrangements plus étoffés (Supa Ndaanane), Awadi vogue entre afro pop assez légère (Merci mon Dieu, sur laquelle figure son pote des premières heures Doug-E-Tee), reggae plus pur et hip-hop. Malheureusement, la musique est parfois un peu kitch, avec des petits bruits de rayons laser et des saxophones digitaux et des claviers empruntés à  Maxi Priest ou Inner Circle… Moyen… Mais lorsqu’il s’affirme haut et fort, ça donne des pièces fortes comme J’ai pas le temps, dans laquelle il lance : « Ma mission est claire comme le R de révolution ».

On a ici un homme qui est plus préoccupé par le sort des siens, et qui analyse la situation mondiale, critiquant les décisions mondiales, la faiblesse de l’Union Africaine, le désintérêt des pays du nord… « Rien à foutre, un Africain se meurt » accuse-t-il cyniquement. Il s’adresse ici à une Génération consciente, comme il l’explique dans la chanson ainsi baptisée. On va passer l’éponge sur ses petits défauts au niveau instrumental. “Ma révolution” aurait été un document beaucoup plus percutant si la musique avait appuyé le propos au lieu de rester légère et estivale (Jam on it), mais d’un autre côté, ces reggaes sont savoureux et on danse… en souriant jaune lorsque les textes nous rattrapent.

On souligne aussi la très belle reprise du classique de Fela Kuti « Emma », remplie de soleil et de bonne humeur, dans un titre qu’il renomme Jamm ci Casamance, mettant en vedette Bouba Kirikou et Natty Jean. Quelle excellente mélodie, on ne s’en tanne jamais!

Né en 1969 dans la capitale sénégalaise, Dakar, son père est originaire du Bénin et sa mère du Cap-Vert. Pionnier du mouvement rap en Afrique de l’Ouest, Didier Awadi a fondé en 1989 le groupe Positive Black Soul (PBS) avec Doug-E-Tee (alias Amadou Barry). En 2002, il publie son premier album solo Kaddu Gor, (ce qui signifie « Parole d’honneur » en français), ce qui lui vaudra d’être le lauréat du prix RFI Musiques du Monde en 2003.

Didier-Awadi-Ma-Revolution

Artiste: Awadi
Album: Ma révolution
Étiquette: Studio Sankara

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Mélomane invétéré plongeant dans tous les genres et époques, Nicolas Pelletier a publié 6 000 critiques de disques et concerts depuis 1991, dont 1100 chez emoragei magazine et 600 sur enMusique.ca, dont il a également été le rédacteur en chef de 2009 à 2014. Il publie "Les perles rares et grands crus de la musique" en 2013, lance le site RREVERB en 2014, et devient stratège numérique des radios de Bell Média en 2015, participant au lancement de la marque iHeartRadio au Canada en 2016. Il dirige maintenant la stratégie numérique d'ICI Musique, la radio musicale de Radio-Canada.