Je vous en parlais hier, la journée de samedi allait être spéciale pour moi. Pas parce que j’allais enfin voir Lana Del Rey (!) ou Cœur de pirate sur scène, non non. Parce que j’allais initier ma fille de presque 13 ans à son premier grand festival à vie! Oui, elle m’a souvent accompagné à des concerts, ou encore à des festivals extérieurs comme les Francofolies, le Festival de Jazz et les Nuits d’Afrique, mais Osheaga, c’est quelque chose de spécial. Beaucoup de monde. Beaucoup beaucoup de monde. C’est impressionnant pour une jeune fille de 13 ans.

Le choc avec la foule a débuté dans le métro. Elle n’avait jamais vu autant de monde s’engouffrer dans les corridors ni chanter bruyamment dans les wagons. « Ils sont fous! » me dit-elle un peu paniquée… Mais non, ils sont simplement heureux d’aller voir plein de concerts avec leurs amis.

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La populaire scène Piknic électronique (photo Eva Blue)

Arrivés sur le site, il y a encore plus de monde! Ça marche assez rapidement dans toutes les directions. Les gens savent où ils vont et ne veulent pas manquer le début du concert de leur artiste préféré. Ce qui cause parfois de grands mouvements de foule, comme celui où le coin des scènes Arbres-Vallée-Verte s’est presque complètement vidé pour le concert de BASTILLE qui avait lieu sur une des grandes scènes. Ça aussi c’est impressionnant.

Ma fille, vous vous en doutez, a entendu beaucoup de musique dans sa vie. Mais du haut de ses presque 13 ans, elle a un petit penchant pour la pop style Ariana Grande, Alessia Cara ou même (ça fait mal) le Bieber (mais « juste le dernier album », précise-t-elle toujours). Elle manquera malheureusement Melanie Martinez qui joue dimanche, dont elle raffole…

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La chanteuse de JULY TALK prend un bain de foule (photo Pat Beaudry)

Je lui ai donc préparé un parcours assez accessible pour ses goûts, tout en essayant d’attraper quelques concerts que j’avais vraiment envie de voir. Quelques choix déchirants, mais bon. J’aime mieux être avec ma fille, qu’avec un band.

Le band de Brooklyn LUCIUS, mené par Jess Wolfe et Holly Laessig a livré une bonne performance sur la scène Verte en milieu d’après-midi. Des morceaux complètement cacophoniques succédaient aux chansons hyper accrocheuses et entraînantes. De bons comme de moins bons moments. Ces deux filles savent très bien chanter, mais virent parfois sur le top. Leur costume et perruque identiques donnaient l’impression de jumelles. Marrant.

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LUCIUS (photo Tim Snow)

Dès qu’elles eurent terminé, une jeune chanteuse brunette prenait place sur la scène de la Vallée. « Ah! Intéressant. Cette fille a une super belle voix et un excellent sens de la chanson. C’est pas mal cool ce qu’elle fait! Qui est-ce? » Et je fouille dans l’horaire et – à chaque fois – je fais « whoa, c’est CHARLOTTE CARDIN! » À chaque fois que je l’entends, je me dis la même chose. Dans le genre de Lou Doillon (très bonne elle aussi).

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CHARLOTTE CARDIN (photo Tim Sbow)

Autre élément impressionnant : les petites tenues des filles de 20 ans. Plutôt prude (thank God), ma préado préférée a été assez choquée par plusieurs tenues très sexy des jeunes femmes qui fréquentent Osheaga. Et, comment dirais-je ça pour ne pas passer pour un vieux pervers…, certaines ne laissent pas grand-chose à l’imagination. Ce n’est pas qu’on veuille nécessairement fixer les filles qui passent devant soi, mais lorsque certaines demoiselles ne portent qu’un petit top en lin, sans soutien-gorge, et qu’elles sont allées danser dans la fontaine d’eau, ben… c’est sûr qu’elles se font remarquer! « Mais elles sont presque nues!! » me souligne ma fille, un coup de coude dans les côtes. Hein? Qui ça? Ah oui, je vois, ma chérie… Oui, leur linge va sécher rapidement au soleil avec le petit vent. O_o

On s’est ensuite déplacé aux grandes scènes, pour un moment de stoner rock en plein après-midi avec KURT VILE et ses VIOLATORS. J’avoue que je cherche souvent ces bons moments au soleil, avec des bands qui font ce genre de rock indie stable mais intense, qui vous embarquent dans leur trip, subtilement. J’étais tombé sous le charme de Tame Impala lorsqu’ils n’étaient pas connus en 2012, puis ai vraiment aimé The War On Drugs l’an passé. Kurt Vile a été le porte-étendard du rock indie samedi à Osheaga et c’était vraiment cool de l’entendre chanter son lazy rock nasillard au soleil. Yeah.

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KURT VILE (photo Pat Beaudry)

Nous avons rejoint les amis, écouté les deux premiers morceaux de THE ARCS, le projet du chanteur des Black Keys, avons haussé les épaules et décidé de poursuivre notre chemin.

Il était temps de casser la croute, alors on a visité un des food trucks qui sont au pied de la monumentale statue de « L’homme » d’Alexander Calder, haute de 21 mètres et lourde de 40 tonnes, en acier inoxydable. Le choix est intéressant et l’ambiance est sympa. La poutine au porc effiloché de Jérôme Ferrer est délicieuse. Le petit vent du fleuve était le bienvenu.

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La statue de l’homme (photo Nico Pelletier)

Nous sommes retournés à l’autre bout du site pour voir le band indie pop BEST COAST, dont l’album aux mélodies accrocheuses m’avait plu. Mais honnêtement, leur set est passé dans l’indifférence absolue. Une petite foule les écoutait distraitement, et leur performance était assez beige. Vraiment dommage.

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BEST COAST (photo Tim Snow)

On a pu aller écouter quelques minutes du DJ THE RANGE qui tenait l’ambiance très relax, très soul, sur la scène Piknic électronique, ce qui était fort juste pour ce moment de la journée, mais lorsqu’on y est retournés pour découvrir MURA MASA, c’était jam-pack de monde et impraticable. Dommage car la musique qu’on entendait au loin semblait vraiment cool.

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La chanteuse qui accompagne MURA MASA (photo Eva Blue)

Notre soirée à Osheaga s’est ensuite tournée vers le trio de sœurs HAIM, qui donnent un bon show – très apprécié par ma fille, mais qui sont vraiment pop pour Osheaga. La bassiste a beau se démener et lancer des « we’re having a f**ing party », il demeure que leurs chansons sont dans un moule commercial qui jurait pas mal avec le reste de la programmation. Disons qu’on est loin des headliners des premières éditions : en 2006 on parlait de Sonic Youth, Clap Your Hands Say Yeah, Malajube et Amon Tobin, en 2007 de Bloc Party, Arctic Monkeys, Feist, Interpol et Blonde Redhead, en 2008 de Cat Power, Jack Johnson, The Killers, Iggy & the Stooges… etc.

HAIM (photo Pat Beaudry)

HAIM (photo Pat Beaudry)

L’important était que ma fille voit un groupe qu’elle aime beaucoup, et c’est ce qu’on a fait. Autre choc culturel pour elle, les joints! « Ah, qu’est-ce qui pue comme ça? » Oui, c’est de la drogue, ma chérie. « C’est pas illégal de fumer de la drogue? » Oui, pour le moment, mais Justin Trudeau est en train d’évaluer ça. « Ah bon? Et là tout le monde va pouvoir fumer de la drogue? » La suite de cette conversation aura lieu plus tard à la maison, le show de HAIM a repris son attention.

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L’apprenti reporter au show de HAIM

Ce furent ensuite THE LAST SHADOW PUPPETS qui nous amenèrent à l’autre bout du site. Le charme indéniable, même si volontairement exagéré, le chanteur des Arctic Monkeys, Alex Turner, a fait manger la foule d’Osheaga dans sa main avec son attitude de crooner moderne. La nuit tombait sur Montréal, au son des violons, des guitares grinçantes et de cet Elvis plein de twang, et de son acolyte en robe de chambre, Miles Kane (des Rascals). La jeune fille a bien rigolé et apprécié, moi aussi. On s’est reposé les pieds, assis dans les estrades pour regarder le concert.

Lorsque cette performance s’est terminée, c’est la Norvégienne d’AURORA, juste à côté, scène des Arbres, qui nous a beaucoup plus. Un aspect presque médiéval dans certaines de ses chansons, assez planantes, presque angéliques. Aurora Aksnes a l’élégance d’une Enya lorsqu’elle chante mais sa musique est plus près de celles de Florence + the Machine. Je vais certainement mieux écouter son récent et premier album « All My Demons Greeting Me as a Friend » paru en mars dernier.

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AURORA (photo Pierre Bourgault)

J’espérais un miracle de la part de LANA DEL REY. On m’avait dit que ses concerts précédents avaient été d’un ennui mortel. Mais j’espérais que son charme rétro allait pouvoir faire planer la foule. Le traitement vidéo en noir et blanc amenait une ambiance rétro, comme une madone des années 50. On se serait crûs dans un vieux film, dans une histoire mélancolique où l’héroïne finit par se jeter en bas d’une falaise… un peu comme dans Hitchcock ou de Lynch. Bref, magique non, mais pas plate non plus. Quelque part entre les deux. J’avoue que le personnage est fascinant, qu’elle est une diva de la pop, certes, mais en même temps elle démontre une sensibilité et une vulnérabilité qui touche.

Je ne deviendrai pas un fan fini demain, mais écouter les High By The Beach, Honeymoon et Summertime Sadness par une belle soirée d’été, avec les feux d’artifice au loin, c’était sympa. Avec ma fille de presque 13 ans en plus, c’est encore mieux.

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photo Tim Snow

 

Dimanche, c’est Radiohead!

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Mélomane invétéré plongeant dans tous les genres et époques, Nicolas Pelletier a publié 6 000 critiques de disques et concerts depuis 1991, dont 1100 chez emoragei magazine et 600 sur enMusique.ca, dont il a également été le rédacteur en chef de 2009 à 2014. Il publie "Les perles rares et grands crus de la musique" en 2013, lance le site RREVERB en 2014, et devient stratège numérique des radios de Bell Média en 2015, participant au lancement de la marque iHeartRadio au Canada en 2016. Il dirige maintenant la stratégie numérique d'ICI Musique, la radio musicale de Radio-Canada.