On avait un peu oublié ces Belges depuis les belles années 93-94, alors qu’il avaient frappé avec les singles W.C.S. et Suds & Soda, de l’album “Worst Case Scenario”, sorti chez Island. L’énergie, le violon strident, les mélodies… plusieurs éléments rappelaient les meilleurs moments du Velvet Underground! Mais voilà que le grunge, le lounge puis le folk lo-fi s’emparèrent de nos lecteurs CDs et le rock bien ficelé des formations telles dEUS furent un peu laissé de côté.

En 2005, les choses sont différentes. Les groupes de guitares ont de nouveau la cote: Radiohead, Interpol, pour ne nommer qu’eux deux, arrivent à combiner muscle musical avec sensibilité. Et voici que rappliquent Tom Barman et sa bande, dont seul le violoniste et claviériste Klaas Janzoons a survécu aux années de vaches maigres. Et ils reviennent avec un album extrêmement solide, dont chacune des chansons est unique, spéciale, réussie. Bad Timing annonce des passages axés sur les six cordes, mais dès le titre suivant, 7 Days, 7 Weeks, Barman prend un ton beaucoup plus doux, plus romantique. dEUS jouera tout au long de leur quatrième album avec ce contraste, parfois d’une pièce à l’autre et parfois au sein du même morceau, comme dans le cas de Stop-Start Nature où la voix passe de murmurée à criée, noyée dans une mare de guitares tournoyantes.

 

Les trois nouveaux membres font un boulot impeccable pour reformer un esprit de meute autour de leur leader Barman. Le batteur Stéphane Misseghers, le bassiste Alan Gevaert et le guitariste et choriste Mauro Pawlowski prennent leur place. Le dernier de la liste était également le leader d’une autre formation belge du début des années 90, Evil Superstars, en plus de collaborer à Mitsoobishy Jacson, Kiss my Jazz, Monguito, Shadowgraphic City au fil des ans. Simultanément à dEUS, le talentueux musicien prend place chez The Love Substitutes, Othin Spake, Club Moral, Archetypes of the Multisabanas et I Hate Camera. Un gars occupé! Sur scène au Main Room à Montréal, Pawlowski agissait presque en tant que deuxième tête pensante de la formation. Stoïque et élégant, il complétait en contraste l’exubérance et le « big mouth » de Barman.

 

Pour en revenir à « Pocket Revolution », apparu après une pause créative collective qui permit à son leader de réaliser un film puis de lancer l’un des plus grands événements musicaux gratuits qu’Anvers – leur ville natale – ait connus, 0110 Festival for Tolerance, il continent de très belles chansons. Include Me Out, The Real Sugar et Nothing Really Ends sont des classiques instantanés, tellement Barman y met tout son coeur. À l’autre bout du spectre, What We Talk About (When We Talk About Love) est un morceau vigoureux et accrocheur alors que Sun Ra est basée sur une longue et intense montée en intensité. Énergiques ou calmes, les gars de dEUS contrôlent tout avec minutie et retenue. Les rares solos sont mélodiques, les percussions sont riches, les choeurs et harmonies enrichissent le tout. Vraiment de beaux moments à découvrir dans les détails.

 

dEUS avait débuté sa carrière sur des chapeaux de roue en vendant plus de 750 000 copies de leurs trois premiers albums, au total, ainsi qu’une belle réponse des médias spécialisés. Après « Pocket… », la formation lancera trois autres albums en quatre ans, parfois mal distribués en Amérique, menant la voix à des formations européennes telles que Dyonysos et My Little Cheap Dictaphone, Bretons et Belges, respectivement. Tant mieux si les dieux font des petits: on n’aura jamais assez de bonne musique rock à écouter.

deus pocket revolution

dEUS
Pocket Revolution
(V2, 2005)

Desc.: rock alternatif intense
Dans le même genre que My Cheap Little Dictaphone, Tindersticks, The National

Lien vers l’achat en ligne (iTunes)
Lien vers la page Facebook du groupe

Réagissez à cet article / Comment this article

commentaires / comments

About The Author

Mélomane invétéré plongeant dans tous les genres et époques, Nicolas Pelletier a publié 6 000 critiques de disques et concerts depuis 1991, dont 1100 chez emoragei magazine et 600 sur enMusique.ca, dont il a également été le rédacteur en chef de 2009 à 2014. Il publie "Les perles rares et grands crus de la musique" en 2013, lance le site RREVERB en 2014, et devient stratège numérique des radios de Bell Média en 2015, participant au lancement de la marque iHeartRadio au Canada en 2016. Il dirige maintenant la stratégie numérique d'ICI Musique, la radio musicale de Radio-Canada.