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Je suis le premier à encourager les artistes d’ici. J’ai écris des centaines d’articles sur les Jimmy Hunt, Bori, Porcelaine, Rouge Pompier, Grim Skunk, et tant d’autres. Très peu sur la pop formatée pour la radio, je l’avoue. Trop souvent, ces albums sans surprise et sans personnalité m’ennuient. J’ai beau essayer, rien n’y fait.

De temps en temps, un nouveau venu me surprend. Il débarque de nulle part (du moins à ma connaissance) et reste accroché dans ma playlist un peu plus longtemps que les autres. L’an dernier, j’ai apprécié « Territoires » de Sébastien Lacombe. J’en parlais ici. Plus tôt cet automne, c’est Laurence Hélie qui charmait mes oreilles.

Cet hiver, c’est un certain Guillaume Arsenault qui m’allume, avec son « Oasis Station-service ». Déjà, le titre m’a attiré, par son mystère à la Hubert Félix Thiéfaine. En regardant d’où ça venait, j’ai vu « Productions de l’Onde », le label mené par Edgar Bori. L’homme ne s’associe pas aux artistes pop insipides. Ça promet.

On commence l’écoute. Ça débute avec un instrumental (Le Pic du brûlé) plantant tout de suite le décor et l’ambiance, à la Ennio Morricone, influence qu’on retrouve tout au long de l’album (L’ombre des cactus). On part dans un road trip (Je pars au combat), dans un désert américain (Monotonie spectaculaire – dont l’histoire, pourtant, se déroule en plein hiver) avec de grosses guitares aux influences surf rock Americana. Les textes d’Arsenault sont mélancoliques, tout comme sa musique. Sans trop s’épandre dans trop de détails, ses mots laissent comprendre que l’homme fuit quelque chose, ou quelqu’un. Il attache une belle importance à la description des décors, chose que l’on n’entend pas souvent. Voyez plutôt :

Monotonie spectaculaire / Que des nuages et de la lumière

Des répétitions, nuances et d’ennui / C’est l’horizon qui me divertit

 

guillaume-arsenault-photo

Notre homme en échappe quelques-unes, parmi les 12 titres de son quatrième album. Les Policewomen est une tentative de chanson plus humoristique dans laquelle il s’attaque aux femmes policières avec quelques phrases creuses et rimes faciles. Aucun intérêt.

Heureusement, ces moments maladroits sont plutôt rares sur « Oasis Station Service » et l’ensemble est plutôt réussi. Il partage ses passions et son quotidien en utilisant des images poétiques, ce qui est assez captivant par moment (Détordre les boyaux). Musicalement, Arsenault sait jouer avec les intensités pour créer une ambiance propice aux confidences (Le feu de camp chante).

Le Gaspésien de 37 ans a baigné dans l’univers des Rivard, Séguin et Fiori, avant de sortir un premier démo alors qu’il fréquente le Collège d’Alma, où, selon la légende, il traîne davantage avec les étudiants en musique et sonorisation que ceux du programme d’ébénisterie dans lequel il est inscrit. Premier fait d’armes : il remporte en 2001 les honneurs du Festival en chanson de Petite-Vallée. Suivra un premier CD, au titre original, « Guillaume et l’arbre ».

Il rafle le Prix de la création artistique du CALQ en Gaspésie, puis lance en 2006 « Le rang des Îles », qui se retrouvera en nomination aux Prix de la musique folk du Canada. « Géophonik » suivra en 2009, méritant deux nominations à l’Adisq. Il sera élu révélation Radio-Canada Espace Musique cette année-là.

http://www.youtube.com/watch?v=GNXN0qhEwvg

Les influences entendues sont aujourd’hui davantage puisées chez Franck Monnet (La fin du monde), avec une touche jazz mystérieuse à certains endroits, comme sur la pièce titre, Oasis Station-service. Le musicien a une vaste expérience de l’exploration sonore, participant à des projets uniques tels que ce disque réalisé avec les enfants de son village (« J’ai jasé avec mon village » en 2010) soulignant le 250e anniversaire de l’arrivée des premiers colons à Bonaventure, ou cette bande sonore des livres de Philippe Garon, puis de Sylvain Houde, « Comment appeler et chasser l’Orignal ».

 

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Artiste : Guillaume Arsenault
Album : Oasis Station-service
Étiquette : Productions de l’Onde

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Mélomane invétéré plongeant dans tous les genres et époques, Nicolas Pelletier a publié 6 000 critiques de disques et concerts depuis 1991, dont 1100 chez emoragei magazine et 600 sur enMusique.ca, dont il a également été le rédacteur en chef de 2009 à 2014. Il publie "Les perles rares et grands crus de la musique" en 2013, lance le site RREVERB en 2014, et devient stratège numérique des radios de Bell Média en 2015, participant au lancement de la marque iHeartRadio au Canada en 2016. Il dirige maintenant la stratégie numérique d'ICI Musique, la radio musicale de Radio-Canada.