C’était le grand retour de Jay-Jay Johanson à Montréal hier soir. D’abord: un rapide détour dans le temps: dans les années 70, le public québécois avait une connection unique avec le progressif. Les ventes d’albums de Genesis atteignaient des sommets ici, Supertramp se faisait un plaisir de passer par Montréal et Harmonium faisait sa marque à l’international, sans compter le bassin d’indéfectibles fidèles à King Crimson. Où je veux en venir? Alors que le trip hop apparaissait au milieu des années 90, le public québécois a rapidement adopté le genre avec la même passion qu’il avait jadis adopté cette autre tendance actuelle. D’abord avec les incontournables Portishead, mais aussi avec un jeune (et plus blond que jamais) suédois du nom de Jay-Jay Johanson, dont le premier album Whiskey a connu un tel succès que la défunte étiquette BMG décida d’en faire la distribution exclusivement pour le marché québécois. Le succès s’est poursuivi avec l’album Tattoo, mais la consécration est véritablement arrivée avec Poison, summum du genre au visuel “hitchcockien”.

S’il a toujours fait honneur à sa thématique du coeur brisé, le détour vers l’électro clash (réussi et toujours actuel, mais un coup d’épée dans l’eau commercial) Antenna n’a pas marqué l’imaginaire, puis Jay-Jay est revenu depuis quelques albums à une formule minimaliste à cheval entre ses origines et un free jazz en quelque sorte passe partout, dont le plus récent Cockroach synthétise bien l’essence.

Le seul autre fil conducteur de cette trajectoire? Sa voix, douce et parfois en hauteur, unique et émotive, contemplative et nostalgique. C’est cette dernière qui était mise en valeur hier au Théâtre Gesu devant un public complet conquis d’avance. Accompagné de pistes pré enregistrées et de son fidèle acolyte Erik Jansson aux claviers, mais aussi de sobres projections d’auto portraits, il s’est montré généreux, détendu, mais surtout content d’être de retour.

Le “setlist” a couvert toutes les périodes de sa carrière, des favoris aux plus obscurs en passant par deux nouveautés de l’album Opium (à paraitre en avril). Si “So Tell The Girls That I Am Back In Town” et “I’m Older Now” ont automatiquement été acclamées, il a su remettre en perspective d’autres perles comme la magnifique “Tomorrow” et la version simplement piano-voix toujours aussi poignante de “She’s Mine But I’m Not Hers”.

Bref, alors que son passage dans le cadre de la tournée Antenna au Spectrum il y a plus d’une décennie (spectacle dans le cadre duquel il avait fait la grande demande à celle qui est aujourd’hui sa femme) avait duré moins d’une heure et que le plus récent à l’Ex Centris n’était pas dans les meilleures conditions, le contexte intimiste était cette fois parfaitement au point pour sa voix qui atteint de nouveaux sommets. Le parfait antidote à une autre froide semaine.

Ne reste plus qu’à attendre ce “Opium”, puis, espérons le, un peu moins longtemps avant le prochain passage.

 

Consultez le point de vue de mon collègue Nicolas Pelletier qui a lui assisté au concert du lendemain, dimanche 22 février 2015

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Obsessif compulsif qui classe ses albums d’abord en ordre alphabétique d’artistes, puis de parutions (avec les simples sous les albums, question de confondre encore davantage les gens qui le visitent), Karl-Philip oeuvre dans l’industrie depuis plus d’une décennie. Il a touché à tout: maisons de disques, gestion de salles de spectacle et rédaction professionnelle pour de nombreux artistes. Il assiste à de nombreux shows lorsqu'il n'est pas désespérément en train d'essayer de faire de la place dans sa bibliothèque musicale.