Au début du présent siècle, le rock indépendant n’était pas aussi populaire qu’aujourd’hui. Le lounge, l’électro, et le hip-hop prenaient beaucoup de place dans le ratio d’écoute du mélomane moyen. Et tant mieux! Par le biais des St-Germain, US3 et Érik Truffaz, le lounge a renouvelé l’intérêt envers le jazz, qui est redevenu cool et adopté de nouveau par les plus jeunes mélomanes qui le boudaient.

Parmi les bands indie rock qui se faisaient remarquer par les fans de ce style il y avait The Delgados. Une formation écossaise (de Motherwell dans le North Lanarkshire, précisément) dont on pourrait situer la musique à mi-chemin entre celle de Belle and Sebastian pour le spleen, et At The Drive-In ou les Breeders pour les aspects plus rock. Avec une touche de Velvet Underground très prononcée par moments. The Delgados pouvaient très bien insérer un solo de flûte traversière sur une suite d’accords bourrés de distorsion.

Leur 3e album, « The Great Eastern », est l’un de leurs meilleurs, notamment grâce à des morceaux épiques comme Accused of Stealing, qui joue sur le contraste de la jolie voix d’Emma Pollock sur le rythme soutenu des trois gars qui l’entourent. Ce ne sont toutefois pas tous les titres sur leur 3e opus sur les 5 qu’ils enregistreront en carrière, qui sont aussi solides. Witness sonne un peu trop comme un titre secondaire des Breeders et No Danger, chantée par l’autre voix du groupe, Alun Woodward, ne jouit pas d’une mélodie inoubliable, qui aurait rendu Belle and Sebastian jaloux. Sur des morceaux plus explosés au niveau de la forme, comme The Past That Suits You Best, on sent davantage l’influence créative d’un Beck, jusque dans la façon de chanter un peu flegmatique que prennent Pollock et Woodward.

 

Il n’en demeure pas moins que les Delgados ont été un groupe charnière dans le mouvement indie rock, parmi les premiers à aussi bien jumeler les mélodies douces aux solides riffs d’accords musclés (Thirteen Gliding Principles), sans chercher à recréer l’effet grunge de Nirvana ni le punch des Pixies. À l’époque, c’était parmi ce qui se faisait de mieux dans ce créneau.

Pour la petite histoire, Pollock était initialement la copine du batteur Paul Savage. Ils ont nommé leur groupe en référence au vainqueur de l’édition 1988 du Tour de France, Pedro Delgado. Le groupe cesse ses activités en 2005 lorsque le bassiste Stewart Henderson, désillusionné, trouve que le groupe n’obtient pas le mérite qui lui revient après 11 ans d’efforts.

Emma Pollock poursuivra sa carrière en solo et en collaborant aux groupes The Burns Unit et Future Pilot AKA. Woodward a lancé un album solo en 2009 sous le nom Lord Cut-Glass. Celui qui s’en sort le mieux est Paul Savage qui deviendra un réalisateur fort prisé, travaillant avec Franz Ferdinand (l’album « Tonight »), Mogwai, Arab Strap, Camera Obscura et bien d’autres.

THE DELGADOS
The Great Eastern
(Chemikal Underground, 2000)

-Genre: rock indé créatif
-Dans le même genre que The Breeders, Belle and Sebastian, Beck

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Mélomane invétéré plongeant dans tous les genres et époques, Nicolas Pelletier a publié 6 000 critiques de disques et concerts depuis 1991, dont 1100 chez emoragei magazine et 600 sur enMusique.ca, dont il a également été le rédacteur en chef de 2009 à 2014. Il publie "Les perles rares et grands crus de la musique" en 2013, lance le site RREVERB en 2014, et devient stratège numérique des radios de Bell Média en 2015, participant au lancement de la marque iHeartRadio au Canada en 2016. Il dirige maintenant la stratégie numérique d'ICI Musique, la radio musicale de Radio-Canada.