Cet article est le premier de deux sur le retour sur scène et la renaissance artistique d’Elvis Presley en 1968-69.

En 1968, la carrière d’Elvis Presley était sur une pente descendante. Celui qui a pratiquement inventé le rock ‘n’ roll à lui seul en 1954-55 (avec l’aide de Scotty Moore et Bill Black!) était devenu un acteur de films de deuxième ordre. Des trames sonores très inférieures à ses succès des années 50 accompagnaient ces navets. Depuis son retour de l’Armée, en 1960, Elvis s’était en effet consacré au cinéma, au détriment de sa carrière sur scène. Son puissant gérant, le « Colonel » Tom Parker (son vrai nom était plutôt Andreas Cornelis van Kuijk, et il était né aux Pays-Bas), avait conclu de lucratives ententes qui pouvaient rapporter à Elvis jusqu’à un million de dollars par film, en plus d’un pourcentage des profits. À environ trois films par année, en plus du travail en studio, il restait donc bien peu de temps à Elvis pour accomplir autre chose.

Elvis Presley n’a jamais composé de chansons de sa vie, et il se faisait fournir des chansons plutôt ordinaires. De plus en plus, il s’ennuyait, conscient qu’il passait à côté de sa carrière. Il se faisait ridiculiser, et pour ses rôles d’acteur et pour sa musique. Qui plus est, les profits étaient en baisse constante. La nouvelle génération de rockeurs, des Beatles aux Doors, en passant par Bob Dylan et les Rolling Stones, avait complètement surpassé le « King ».

C’est alors qu’une formidable opportunité s’est présentée à Elvis, sous la forme d’une émission spéciale qui serait diffusée à NBC le 3 décembre 1968. Conçue à la base comme un spectacle de Noël (c’est du moins ce que le Colonel voulait), cette émission a finalement marqué le retour d’Elvis en tant qu’artiste crédible. Elle sera connue sous le nom de ’68 Comeback Special et amorcera le retour d’Elvis sur scène, qui se concrétisera avec la première de ses nombreuses apparitions à Las Vegas en août 1969.

Steve Binder a agi en tant que réalisateur, et son rôle a été crucial. C’est lui qui s’est opposé au Colonel afin que les chansons de Noël soient réduites au minimum : on n’y retrouvera finalement qu’une version écourtée de Blue Christmas. C’est aussi lui qui a eu la merveilleuse idée de filmer des segments où Elvis improvise avec ses camarades. C’est après avoir vu Elvis s’amuser de la sorte avec plusieurs personnes de son entourage (la fameuse « Memphis Mafia ») que Binder a eu l’idée d’inclure de telles séquences. Il a aussi été décidé d’amener un public, au tour duquel joueraient Elvis et ses musiciens (dont Scotty Moore et D.J. Fontana, les premiers musiciens d’Elvis; Bill Black était décédé en 1965).
elvis presleyCes medleys constituent les meilleurs moments de l’émission. Avec son habit de cuir noir, Elvis crève l’écran. Il se réapproprie finalement son répertoire rock des années 50 et réaffirme sa vitalité, après des années en demi-teinte. Les numéros d’ouverture et de fermeture de l’émission sont aussi très bien faits. En ouverture, une centaine d’Elvis sont perchés dans une structure, semblable au numéro du film de Jailhouse Rock, alors que le King chante Trouble et Guitar Man. À la fin, tout vêtu de blanc, Elvis interprète If I Can Dream, une nouvelle chanson écrite par Walter Earl Brown. Plein d’espoir, ce morceau entre soul, gospel et pop met un point d’exclamation au grand retour d’Elvis.

Sortie une dizaine de jours avant le ’68 Comeback Special, la trame sonore est très bonne, avec quelques longs medleys, de même que deux pièces originales (Memories et If I Can Dream). On y retrouve un excellent mélange de rock, de blues, de country, de soul, de gospel et de pop. Écouter cette trame sonore ne peut toutefois égaler l’impact visuel du ’68 Comeback Special. Bien que la facture visuelle soit parfois quelque peu datée, les moments forts sont nombreux. Les segments où Elvis est assis avec ses amis et improvise (qui peuvent d’ailleurs être vus comme précurseurs du populaire concept Unplugged, développé surtout par MTV dans les années 90) sont savoureux pour leur authenticité et le plaisir que semblent avoir tous les participants et le public.

Revigoré par cette expérience, Elvis retournera en studio au début de l’année 1969 et deux séries de sessions intensives produiront certaines des meilleures chansons de toute la carrière de Presley. Pour cela, il n’ira pas très loin de Graceland. En effet, pour la première fois en 14 ans, il enregistrera à Memphis.

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Elvis Presley - '68 comeback special

ELVIS PRESLEY
’68 Comeback Special
(RCA, 1968)

-Genre : hybride entre rock, soul, pop, gospel, blues et country
-Dans le même genre que Ray Charles, Johnny Cash et Roy Orbison

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ELVIS PRESLEY : Le grand retour
Originalité90%
Authenticité95%
Accessibilité95%
Direction artistique90%
Qualité musicale90%
Textes80%
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Curieux de nature, Benoit est un boulimique musical qui consomme de presque tous les genres. Du punk au classique, en passant par le folk, le psychédélique et le rockabilly, il sait apprécier les subtilités propres à chacun de ces courants musicaux. À travers des centaines d'heures d'écoute et de lecture de biographies, il tente de découvrir les motivations et les secrets derrière les plus grands albums et les œuvres grandioses des derniers siècles. Il parcourt aussi les salles de spectacle de Montréal, à la recherche de vibrations directes.