Parmi les gens les plus passionnés par la musique, il y a ceux et celles qui travaillent dans l’industrie: chez les labels, les relationnistes de presse, les promoteurs de concerts, les gestionnaires de salles de concert, les journalistes culturels, etc. RREVERB propose une série d’entrevues avec les artisans passionnés de la musique. Cette semaine, rencontrons… FLORENT BONY Quel est votre nom, quel est votre rôle dans l’entreprise musicale où vous travaillez, et depuis quand y œuvrez-vous? D’où êtes-vous et où vivez-vous maintenant? Sur Radio libertaire Je suis Florent Bony de la structure Kalima Productions que j’ai créée il y a 8 ans maintenant. Le Festival Aurores Montréal est né en 2013 et présentera sa 3e édition dans quelques jours. Nous sommes une équipe de Parisiens qui aimons notre ville et y organisons très régulièrement des concerts, à travers différents événements, dont le Festival Aurores Montréal. Quand avez-vous commencé à travailler dans l’industrie musicale? Il y a 8 ans, je travaillais alors dans un petit café-concert à Montmartre, au nord de Paris. La rencontre de plusieurs artistes talentueux venus jouer chez moi m’a poussé à monter une structure pour pouvoir les accompagner et accélérer leur diffusion à un plus grand nombre de personnes. C’est cette structure dont je m’occupe encore aujourd’hui et qui participe à la diffusion de nombreux artistes, dont beaucoup de Québécois. D’où vient l’idée de faire un festival comme Aurores Montréal? Avant tout, la passion de cette scène québécoise si riche et atypique. Des artistes comme Karkwa m’ont fait découvrir qu’on pouvait chanter en français sans forcément faire de la variété ou du mauvais rock français, qu’on pouvait allier des textes profonds à des instrumentations plus anglo-saxonnes, ce qui manque beaucoup ici en France, même si on a de belles choses depuis quelques années. C’est cet exemple que nous avons voulu présenter au public français. Une scène francophone riche et décomplexée, très loin de l’étiquetage perpétuel que nous rencontrons régulièrement ici. la 2e édition, en 2014 Comment est la réaction des Français à cette musique québécoise, qui est différente des chanteurs de variété qu’ils connaissent davantage? Justement, depuis quelques années, les choses s’inversent. Le grand public connaît maintenant tout autant des artistes comme Ariane Moffatt, Karim Ouellett, Klô Pelgag ou Patrick Watson que les Cowboys fringants, seul groupe québécois (hors chanteuses à grosse voix) connu par le public français à l’époque. Et on essaye avec notre festival de participer à ce mouvement et de faire qu’il se perpétue le plus longtemps possible. Avec Ariane Moffatt et la Délégation générale du Québec à Paris, lors de la 1re édition du festival (2013) Quand avez-vous commencé à aimer la musique? Depuis petit… Déjà adolescent, je ne rêvais que d’une chose, c’était avoir mon propre magasin de disques. Mais à force d’aller à des concerts, je me suis davantage tourné vers le spectacle vivant pour privilégier petit à petit cet aspect. À 20 ans, quel était votre rêve (dans le domaine musical)? Avoir mon propre magasin de disques, qui soit aussi un label, une émission de radio… Un peu comme dans la plupart des disquaires anglais il y a quelques années. La 1ere édition, avec Ariane Moffatt (Crédit photo : Hervé Dapremont) SUR L’INDUSTRIE MUSICALE En vivez-vous? Le domaine culturel est difficile. On en vit oui, c’est notre principale source de revenus, mais c’est un combat quotidien. On est obligés de trouver des sources de revenus complémentaires, développer une activité à 360 mêlant plusieurs domaines dans l’industrie du disque. Pour notre part, nous lançons une activité d’édition à partir de 2016. Nous donnons également des cours de « productions dans les musiques actuelles » dans plusieurs écoles parisiennes. Est-il encore possible aujourd’hui de gagner sa vie dans l’industrie musicale? Que faut-il faire pour y arriver? C’est possible oui. Il faut beaucoup de courage et d’abnégation. Beaucoup de passion également. Cela peut paraître cliché, mais ça peut prendre une dizaine d’années avant qu’un projet réussisse donc il faut être armé dès le début, rencontrer les bonnes personnes, suivre les bonnes formations. Il faut être conscient que cela va prendre du temps avant de développer un projet et le rendre durable. Il faut beaucoup de patience. Au FME / Rouyn Noranda Qu’aimez-vous dans votre emploi / occupation actuelle? Le fait de travailler aussi bien sur l’organisation de tournées, que sur du management, du label ou de l’édition implique des journées très chargées, mais aussi très variées. Je ne suis pas tout le temps derrière mon bureau à faire des dossiers de subvention, j’ai beaucoup de rendez-vous, je me déplace souvent hors de Paris, en Belgique, en Suisse et au Québec. C’est une chance que beaucoup d’autres n’ont pas. Quel grand rêve n’avez-vous pas encore accompli? Faire faire l’Olympia de Paris à un de mes artistes. Ce jour-là, je me dirais que j’aurai peut-être pas si mal travaillé… Le vinyle, la cassette, le CD ou le numérique? Le CD est devenu davantage un outil promo qu’autre chose désormais. On va beaucoup plus travailler une sortie numérique qu’une sortie physique seule. Pour la qualité du son et pour l’objet, les vrais passionnés reviennent au vinyle et les disquaires reprennent vie sur Paris, c’est une bonne chose, je crois, le CD étant amené à vivre ses dernières années, les consommateurs auront le choix entre des supports dématérialisés ou le vinyle qui reprendra encore davantage d’importance. Lors d’une visite à Montréal, au Coup de coeur francophone, novembre 2015 SUR LES ARTISTES ET LA MUSIQUE Vos styles de musique préférés? Est-ce que ç’a toujours été le cas dans votre vie? J’ai toujours écouté de la musique depuis petit, mon père écoutait énormément de musique classique et faisait du piano, ce qui m’a donné le goût d’apprécier certaines belles choses. Si je reste un fan de Pink Floyd, de Sigur Ros ou ce genre de groupes un peu alambiqués, finalement énormément influencé par les structures du classique, ce n’est peut-être pas un hasard… Sur une île déserte, vous emmèneriez ces 5 albums (pas plus). Déjà j’essaierais de me débrouiller pour emmener mon Ipod et le brancher quelque part! Difficile de choisir entre seulement 5 albums, mais alors disons… Sigur Rós, ( ) The Wall des Pink Floyd, Ok Computer de Radiohead, le dernier live de Karkwa et un Best of de Brel …à noter que si on me repose la même question dans 10 jours, les 5 choix seront peut-être tous différents. Playlist! Quel est l’artiste le plus sympathique que vous ayez rencontré? Je dirais Patrick Watson. Il est dans la vie comme sur scène, plein d’humilité et de simplicité. A l’époque de sa toute première venue en France (il y a longtemps, en 1re partie de James Brown), j’aurais pu le faire jouer dans mon petit café-concert à Montmartre, mais nous avions trop de problèmes de voisinage à l’époque. Finalement, ça s’est fini dans les rues de Paris jusqu’à 5 h du matin à jammer avec des amis musiciens, un moment inoubliable. Qu’est-ce qui rend un artiste désagréable? Le manque d’empathie. Il est malheureusement plus difficile pour un artiste de se mettre à la place d’un producteur de spectacle ou d’un manager que l’inverse. Qui aimeriez-vous rencontrer? Grimur, le directeur du Festival Iceland Airwaves, vous pouvez nous mettre en contact?:) On va essayer, Florent! Merci et bon festival! Pour ne rien manquer du Festival Aurores Montréal qui se tient à Paris du 7 au 12 décembre 2015, cliquez sur le logo! Et voici le lien pour connaître les artistes et projets de Kalima productions. crédit photos: Guillaume Roujas Réagissez à cet article / Comment this article commentaires / comments