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Elle se disait nerveuse et impressionnée, mais il n’en paraissait rien : l’auteure-compositrice-interprète Salomé Leclerc a livré un superbe tour de chant hier soir au Théâtre Le National, à Montréal, devant une foule ravie, charmée et attentive à chacun de ses mots. La jeune femme a un aplomb sans prétention, celui de celle qui a confiance dans ses moyens et qui fait honneur aux intenses chansons de son premier album.

Salomé utilise bien les mots. Sa poésie est personnelle et intime sans jamais tomber dans le mélodrame ni les débordements pleurnichards. Pourtant, on comprend à travers les textes que ces chansons ne lui sont pas venues dans des moments de gaieté. Ne reviens pas, Love naïve love, Caméléon nous enfoncent dans l’abîme des amours déchus, ceux qu’on repousse avec véhémence lorsqu’ils nous ont déçus.

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Son seul album jusqu’ici, « Sous les arbres » publié l’automne dernier chez Audiogram, en est un où l’on frôle l’intimité de l’auteur, à la façon de Philippe B (qui a contribué à quelques titres), Avec pas d’casque ou Françoiz Breut. Une douleur sublimée dans des ambiances où le silence joue autant son rôle que la musique. Il fallait la voir, sur scène, égrener doucement chaque note de la fin d’un arpège sur sa belle grosse Epiphone électrique nous laissant savourer le moment, nous laissant digérer la scène décrite. Son inspiration, puisée chez Cat Power, Feist, Émilie Loizeau (réalisatrice de son album) et Sophie Hunger, dont elle reprend la reprise du magnifique « Le vent nous portera » de Noir Désir, la sert bien. Elle a appris d’elles la retenue dans l’émotion, la puissance dans la lenteur.

De PJ Harvey, elle a appris à livrer un rock plus solide, en formation « band ». Ses complices de tournée (le toujours excellent Philippe Brault à la basse, la guitare et au bass drum, Liu-Kong Ha (de Random Recipe) aux percussions et Benoît Rocheleau au trombone, piano et percussions) lui ont créé un canevas qui jumelait intensité et parcimonie pour permettre à la jeune artiste de 25 ans de livrer avec clarté et émotion chaque note qui sortait de sa bouche et de sa guitare. Le seul bémol qu’on peut lui adresser est peut-être le fait de souvent nager dans les mêmes eaux troubles, dans le même sentiment – un peu comme Cat Power à ses débuts —, mais c’est également à son honneur d’avoir conçu un album entier sur un même thème, explorant à fond un territoire. Mais en ayant des modèles comme Feist et PJ Harvey, Salomé Leclerc explorera sans doute d’autres chemins, d’autres ambiances, d’autres émotions au fur et à mesure que son vécu la bousculera, en espérant qu’elle nous partagera ses prochains états d’âme avec la même passion, quand bon lui semblera.

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Prochains spectacles de Salomé Leclerc

Photos © Nicolas Pelletier

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Mélomane invétéré plongeant dans tous les genres et époques, Nicolas Pelletier a publié 6 000 critiques de disques et concerts depuis 1991, dont 1100 chez emoragei magazine et 600 sur enMusique.ca, dont il a également été le rédacteur en chef de 2009 à 2014. Il publie "Les perles rares et grands crus de la musique" en 2013, lance le site RREVERB en 2014, et devient stratège numérique des radios de Bell Média en 2015, participant au lancement de la marque iHeartRadio au Canada en 2016. Il dirige maintenant la stratégie numérique d'ICI Musique, la radio musicale de Radio-Canada.