J’aime bien les gens (pas seulement les artistes) qui ont un parcours atypique, ceux et celles qui n’hésitent pas à envoyer balader leur quotidien au profit de nouvelles expériences de vie. Ça amène souvent de sérieuses remises en questions, mais aussi un regard neuf et allumé sur la vie.

Sébastien Lacombe est de ceux-là. Fort de deux albums parus en 2005 (“Comme au cinéma”) et 2008 (“Impressions humaines”) l’auteur-compositeur-interprète décide de déménager sa famille un an à Bamako au Sénégal. Il a par ailleurs tenu un blogue pour Radio-Canada, relatant son expérience en Afrique (cliquez ici). Il n’est certainement pas le seul musicien à changer de décor, mais de le faire avec une famille et une carrière lentement entamée relève davantage du quitte ou double.

Le voyage n’est pas nouveau pour Lacombe, aujourd’hui âgé de 40 ans. Il plante des arbres dans l’Ouest canadien, visite la côte ouest américaine, le Mexique et le centre des États-Unis. Comme beaucoup de jeunes Québécois, il fait les vendanges en France, mais part ensuite au Danemark et en Espagne pour maîtriser l’allemand et l’espagnol. Il obtient par la suite un baccalauréat en biologie à l’université McGill et une maîtrise des H.E.C.

 

Le musicien qui nous intéresse aujourd’hui a évidemment profité de son séjour à Dakar pour teinter son folk d’un regard neuf. Je n’avais personnellement pas eu l’occasion d’écouter ses deux premiers opus. Celui-ci m’arrive comme une carte de voyage, comme un album de photos d’une période passée à vivre autrement, à vivre ailleurs. Sébastien Lacombe n’a peut-être pas le charisme d’un Kevin Parent, la poésie d’un Philippe B ni l’impudicité d’une Salomé Leclair. Il n’a pas une voix extraordinaire ni un jeu de guitare mémorable. Il a par contre un point de vue sur la vie différent des autres musiciens d’aujourd’hui. Et ça, c’est unique.

Sa vision de Montréal en est une d’un exilé qui s’en ennuie (Montréal sous la pluie), qui s’extasie devant les sourires du marché (La fin du monde). Musicalement, cet album reste légèrement teinté de sonorités ouest-africaines. Ce n’est pas un album qu’on peut classer dans les bacs « world », c’est plutôt un parfum d’Afrique qu’on y retrouve dans son folk occidental. La pièce Adouna nous lance carrément en culture griot, mais il s’agit plus d’un interlude et on revient vite au bercail.

 

Ne vous attendez pas non plus à une version musicale des chroniques de Bruno Blanchet ou des bédés de Guy Delisle. Lacombe est avant tout un musicien qui fait son chemin en suivant son chemin de vie, de père (P’tit gars). C’est lorsqu’on est loin qu’on voit mieux qui ont est. Sur la bien nommée D’où je viens, Lacombe a un regard à la fois poétique et réaliste de la société québécoise qu’il a quittée en y illustrant ses bons côtés (loin des balles de fusil…) comme son imperfection (les bruits de camions, l’humeur de son père) qui fait qu’au fond, nul lieu n’est parfait.

sebastien lacombe territoires

 

SÉBASTIEN LACOMBE
Territoires
(Productions Labombe Inc., 2012)

Lien vers achat en ligne (iTunes)

Réagissez à cet article / Comment this article

commentaires / comments

About The Author

Mélomane invétéré plongeant dans tous les genres et époques, Nicolas Pelletier a publié 6 000 critiques de disques et concerts depuis 1991, dont 1100 chez emoragei magazine et 600 sur enMusique.ca, dont il a également été le rédacteur en chef de 2009 à 2014. Il publie "Les perles rares et grands crus de la musique" en 2013, lance le site RREVERB en 2014, et devient stratège numérique des radios de Bell Média en 2015, participant au lancement de la marque iHeartRadio au Canada en 2016. Il dirige maintenant la stratégie numérique d'ICI Musique, la radio musicale de Radio-Canada.