J’ai passé la soirée à me demander si j’aimais le concert conceptuel « Amours, délices et orgues » de Pierre Lapointe à la Maison symphonique, dans le cadre des Francofolies. Je me faisais presque des listes de pour et de contre tout en écoutant la performance mise en scène par Sophie Cadieux. Et simplement le fait de réaliser ce fait, m’indiquait que je n’étais pas en extase. Mais je n’haïssais pas ça non plus… Essayons de démêler tout ça…

LES POURS

Cinq étoiles pour le renouvellement scénique! Bravo! C’est vraiment une bonne idée de ne pas se limiter à chanter des chansons l’une après l’autre, et d’occuper l’espace de façon créative. Chaque chanson avait son tableau. Trop peu de musiciens investissent dans la présence scénique. Une des grandes forces de Pierre Lapointe.

Intéressantes, ces formes géométriques vaguement cubiques qui servent de décor! Beaux, simples et amenant une certaine dynamique et du mouvement presque constant, mais parfois les assemblages paraissaient inutiles et dénudées de sens, ou n’amenaient rien de plus aux chansons.

Heureusement, il y avait les chansons fortes de Lapointe. On le sent tout de suite, le niveau. Pas parce qu’elles sont connues, mais parce qu’elles sont solides. Le temps s’arrête lorsque s’amorce Nos joies répétitives, Au bar des suicidés, Deux par deux rassemblés (livrée de façon magistrale et originale, en plus!), etc.

LES CONTRE

Mais souvent, à d’autres moments où Lapointe tentait des choses plus différentes (les effets de robots pour une scène futuriste, par exemple), ce n’était vraiment pas aussi facile ou naturel de demeurer concentré sur le propos. Pas à cause de l’effet. À cause du matériel.

Beaucoup de monologues, souvent trop longs. Parfois réussis parce que plus concis (les opinions, le découpage de sa viande) mais parfois vraiment étirées (l’entrevue avec Eric Bernier, la visite chez JayZ) qui devenaient un peu pénibles et manquant de punch. Certains textes auraient eu avantage à être plus ramassés, car on ne voyait pas toujours où on voulait en venir. Devait-on vraiment interroger Lapointe sur son absence d’introspections? En entrevue, avec plaisir! Entre deux chansons à la Maison symphonique, c’était inutile et ça n’amenait rien. Ou je n’ai pas compris le lien…

INTÉRESSANT, MAIS…

Intéressant, ce mélange de chanson, de danse, de conception d’espace, de “théâtre” mais honnêtement, après avoir vu des concerts-concepts très bien montés comme “Monumental” de Godspeed You! Black Emperor et la troupe de danse Holy Body Tattoo, ou encore “Isam” d’Amon Tobin, ou encore les pièces de Dave St-Pierre comme « Un peu de tendresse bordel de merde », je suis resté sur ma faim.

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Toute la bande de Pierre Lapointe

Donc, au final, la grande question… c’était bon? Euh oui. C’était original, comme tout ce que fait Pierre Lapointe, et j’applaudirai déjà uniquement pour cette prise de risques qui le caractérise et qui est franchement rafraîchissante. Était-ce transcendant? Euh, non. J’ai décroché trop souvent pour avoir trouvé le contenu fort et le concept bien ficelé. Était-ce un flop? Pas du tout! Trop d’excellents moments durant ces 90 minutes.
Il y a eu un mélange d’ovation debout et d’applaudissements polis, environ moitié-moitié. Personne n’a crié au génie, mais personne n’a quitté avant la fin non plus. En plus de Lapointe et Cadieux, la performance incluait Étienne Lepage aux textes, le danseur Frédérick Gravel, l’éclairagiste Alexandre Péloquin, l’organiste Jean-Willy Kunz et la designer industriel matali crasset. Tout ce beau monde était sur scène tout au long de la performance, sauf Sophie Cadieux.

Un A pour l’effort. Et on espère d’autres concepts aux prochains shows du talentueux et original Pierre Lapointe!

 

PIERRE LAPOINTE occupe la Maison symphonique de Montréal les 14, 15, 16 et 17 juin 2017, à 20 heures.
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Mélomane invétéré plongeant dans tous les genres et époques, Nicolas Pelletier a publié 6 000 critiques de disques et concerts depuis 1991, dont 1100 chez emoragei magazine et 600 sur enMusique.ca, dont il a également été le rédacteur en chef de 2009 à 2014. Il publie "Les perles rares et grands crus de la musique" en 2013, lance le site RREVERB en 2014, et devient stratège numérique des radios de Bell Média en 2015, participant au lancement de la marque iHeartRadio au Canada en 2016. Il dirige maintenant la stratégie numérique d'ICI Musique, la radio musicale de Radio-Canada.