Il y a déjà 10 ans que Richie Hawtin n’avait rien publié sous son célébrissime pseudonyme Plastikman, alors rien de surprenant à ce que la planète Techno soit en émoi devant la parution d’un nouvel album plutôt inattendu — on l’a annoncé seulement une semaine avant son lancement — et capté en direct lors de deux performances au Guggenheim Museum, en novembre 2013, date qui, incidemment, correspondait presque jour pour jour avec le lancement du tout premier album de Plastikman, “Sheet One”, vingt ans auparavant.

Avec le recul, on peut établir qu’il y a deux périodes distinctes dans l’oeuvre de Hawtin/Plastikman, la première plus Techno et orientée sur les pistes de danse (“Sheet One”, “Musik”, “Recycled Plastik”), et la seconde plus planante et cérébrale (“Consumed”, “Closer”), tandis que son album “Artifakts [bc]” était une oeuvre transitoire qui avait un pied dans la première période et un autre dans la seconde.

EX s’inscrit très clairement dans cette deuxième esthétique, mais ses 7 pièces totalisant 54 minutes ont tout de même un petit quelque chose qui les distingue des autres, un quelque chose que je serais tenté de qualifier de plus organique.

Les pièces sont généralement moins «brumeuses» que sur les deux albums dans la même veine du producteur canadien. J’entends par là qu’elles sont certes aussi cérébrales, mais qu’elles n’ont plus le côté quasi onirique — ou schizophrénique, dépendant de votre personnalité — de “Consumed” et “Closer”.

Mais outre cette impression, il est clair que Hawtin ne réinvente pas la roue sur EX, et ce n’est pas un défaut, tant s’en faut. Plastikman, c’est un son, une esthétique, c’est unique, et espérer qu’il se réinvente sans arrêt est un peu illusoire; Plastikman est à toutes fins pratique un genre musical en soi…

Bon, on pourrait faire valoir que mêmes les styles musicaux évoluent, mais il faudrait être de mauvaise volonté pour affirmer que EX n’est pas une évolution lorsqu’on le met en perspective avec ses prédécesseurs.

Il semble y avoir un thème sous-jacent dans les compositions, celles-ci étant toutes intitulées par un mot début par les lettres e et x — EXposed, EXtend, EXpand, EXtrude, EXplore, EXpire, EXhale — et il est clair que depuis “Consumed” et “Closer”, Hawtin explore à travers son esthétique quasi clinique la tension entre l’humain et la machine et ses impacts sur la psyché, voire le corps lui-même.

plastikman-subpac

À ce chapitre, d’ailleurs, il est intéressant de noter que EX pourra être acheté en édition spéciale utilisant la technologie Subpac, un bidule qui agit de la même façon qu’un subwoofer, mais grâce à des vibrations transmises directement au corps par des vibrateurs afin de vous faire littéralement ressentir les basses fréquences, qui ont de tout temps été centrales à la musique de Plastikman.

Pour moi, après plusieurs écoutes, deux pièces se démarquent clairement des autres — EXpand et EXpire — et valent à elles seules, à mon humble avis, la peine de se procurer cet album. Une autre, EXtrude, est très amusante et rappelle une chorale de ouaouarons, tandis que la pièce finale, EXhale, est très surprenante par sa poésie musicale minimaliste qui n’est pas sans rappeler (mais de façon très subtile) le Jean-Michel Jarre de l’époque “Oxygène”/”Équinoxe”.

EX est offert en écoute intégrale via YouTube, et je vous propose également un court-métrage d’un peu plus de sept minutes sur le «making of» du spectacle dont l’album a été tiré.

 

plastikman-ex

PLASTIKMAN
EX
(Mute, 2014)

-Genre: Techno minimaliste
-Plaira aux amateurs de Carl Craig et du Techno de Détroit, du festival Mutek en général, de Kraftwerk, etc.

Lien vers l’achat en ligne (iTunes)
Lien vers la page Facebook de l’artiste

 

PLASTIKMAN: Si tous les EX étaient comme ça…
Originalité50%
Authenticité80%
Accessibilité65%
Direction artistique65%
Qualité musicale75%
67%Overall Score
Reader Rating: (1 Vote)
90%

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Blogueur - RREVERB
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Baptisé par Pink Floyd, ses parrains sont Bach et les Stones. DJ depuis 1984, batteur autodidacte, producteur de musique électronique depuis 2000, Monsieur Seb a été chef de la section culturelle chez Canoë pendant près de 10 années. Il collabore également sur Archipel Magazine, le blogue — et bientôt magazine imprimé — du label électronique montréalais Archipel.