Tony Allen doit être considéré comme l’un des artisans importants de la musique (et du succès) de la légende africaine Fela Kuti. C’est lui qui tenait la rythmique – si importante! – d’Africa 70, le meilleur des groupes de Kuti. Pour beaucoup, Tony Allen est le meilleur batteur au monde. Vous ferez sans doute convaincu d’ici la fin de cet article.

Sa musique aujourd’hui, l’homme a 74 ans) n’a pas vieillie. Et, comme celle du grand maître nigérien est basée sur de longs jams afrobeat (Moving On) sur lesquels il parle, chante, entre en transe.

Ça serait insulter Tony Allen que de dire qu’il se limite à imiter Fela, ou qu’il vit dans le passé. Oh que non! Il a d’ailleurs connu une très belle carrière après avoir quitté Africa 70. Après avoir passé par Logos et Londres, il s’installe à Paris au milieu des années 80 où il jouera avec Ray Lema, Manu Dibango, et développera ce qu’il appelle l’afrofunk, soit un mélange d’afrobeat, de dub, de R’n’B, de rap et de musique électronique. On l’entendra avec Sébastien Tellier, Charlotte Gainsbourg, Air et fera partie de deux projets avec Damon Albarn : The Good, The Bad & The Queen, puis Rocketjuice and the Moon (avec Flea).

 

Il va insuffler des arrangements complètement modernes, mélangeant habilement des éléments aussi incongrus qu’une guitare surf, des timbales et un clavecin sur un funk (Beat Journey – voir clip ci-dessous), ou un drôle de clavier jouer pour y lancer une mélodie accrocheuse (Tiger’s Skip). Voilà un musicien qui n’a pas peur d’oser, d’expérimenter. Qui a le talent nécessaire pour être à l’aise autant dans l’afrobeat — qui semble être son territoire de prédilection — que dans la musique qui semble créée de toutes pièces pour accompagner une scène de « Kill Bill » (comme Ewa). D’autres fois, on réentend des sons que Gainsbourg avait utilisés au début des années 70, époque « Mélodie Nelson ».

Ce 16e disque de la carrière solo de Tony Allen (il a participé à un très grand nombre d’albums en tant que batteur) est largement instrumental (Afro Kungfu beat). On ne le sent pas particulièrement à l’aise au chant, mais en restant dans ses limites, il fait un excellent travail et ne cause jamais de malaise. La grande force de « Film of Life » réside dans la qualité et l’excentricité des sonorités. On reconnait tous les éléments, mais on n’est définitivement pas habitués à les entendre dans le même morceau (Koko Dance).

Le voici en concert en 2012.

Tony Allen a plus d’un tour dans son sac et un joli carnet d’adresses. À la toute fin de cet opus, un certain Damon Albarn (Gorillaz, Blur) avec lequel il a joué sous la bannière The Good The Bad and The Queen (avec Paul Simonon des Clash et Simon Tong, des Verve), le rejoint pour la magnifique chanson Go Back sur laquelle le Britannique est vraiment à son meilleur. Pas mal!

Wow…

J’adore découvrir des musiciens qui ont eu un parcours important, de plonger dans leur immense répertoire, d’écouter ce qu’ils font aujourd’hui, avec tout ce bagage, toute cette expérience (musicale et de vie), où ils en sont. C’est l’essence de la vie.

TONY ALLEN
Film of Life
(2014, Harmonia Mundi / Jazz Village)

-Genre: afrobeat rock métissé jazz
-Dans le même genre que Fela Kuti, Gainsbourg jam, Gorillaz

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TONY ALLEN : Il y a eu Fela Kuti, et après
Originalité90%
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Mélomane invétéré plongeant dans tous les genres et époques, Nicolas Pelletier a publié 6 000 critiques de disques et concerts depuis 1991, dont 1100 chez emoragei magazine et 600 sur enMusique.ca, dont il a également été le rédacteur en chef de 2009 à 2014. Il publie "Les perles rares et grands crus de la musique" en 2013, lance le site RREVERB en 2014, et devient stratège numérique des radios de Bell Média en 2015, participant au lancement de la marque iHeartRadio au Canada en 2016. Il dirige maintenant la stratégie numérique d'ICI Musique, la radio musicale de Radio-Canada.