Parmi les gens les plus passionnés par la musique, il y a ceux et celles qui travaillent dans l’industrie: chez les labels, les relationnistes de presse, les promoteurs de concerts, les gestionnaires de salles de concert, les journalistes culturels, etc. RREVERB propose une série d’entrevues avec les artisans passionnés de la musique. Cette semaine, rencontrons… CHLOÉ LEGRAND Quel est votre nom, quel est votre rôle dans l’entreprise musicale où vous travaillez, et depuis quand y œuvrez-vous? D’où êtes-vous et où vivez-vous maintenant? Quand avez-vous commencé à travailler dans l’industrie musicale? Chloé Legrand, je travaille dans l’industrie musicale depuis 10 ans. J’ai commencé en France, mon pays d’origine, en tant qu’attachée de presse, bookeuse DIY, assistante de direction, chargé de projet… J’ai surtout travaillé dans des petites structures où tu peux toucher à tout et apprendre beaucoup. J’ai débuté chez Sober & Gentle, l’étiquette de Stephane Gilles qui venait d’être créée et qui avait comme première signature Hey Hey My My. Ensuite je suis passée par la case Beggars group France, que bien entendu, j’ai adoré… J’avais la chance de travailler un catalogue complètement fou, de côtoyer des labels que je respecte énormément (Matador Records, Rough Trade, 4AD, XL Recording…) avec une équipe géniale. C’est mon expérience avec Clarisse Fieurgant qui aura été la plus déterminante, elle m’a tout appris en promo et c’est elle qui m’a donné l’envie de poursuivre en tant qu’attachée de presse. Je suis à Montréal depuis cinq ans maintenant, j’ai eu la chance de rencontrer des gens formidables qui m’ont fait confiance très rapidement. Iconoclaste m’a donné la possibilité d’élargir mon champs de compétence à la promo Web, Jean-Robert Bisaillon, Shanti Loiselle et Gwendolina Genest ont été (et sont toujours) d’une aide incroyable. J’ai eu l’opportunité de travailler pour une major également, chez Universal Music France-Québec et cette expérience a été très formatrice. Nous n’étions que deux (parfois trois) à développer tout le catalogue francophone d’Universal au Québec et finalement, la grosse structure à laquelle je m’attendais en était une autre à taille humaine. Laetitia Simon tenait les rênes de cet empire avec une main de fer! Chloé Legrand et Isabelle Ouimet Ce n’était, ceci dit, pas pour moi car trop loin de ma vision de la musique, de mes goûts musicaux mais cela m’aura décidé à sauter le pas et à partir à mon compte. J’offre des services de relations de presse et de promo web depuis 2 ans maintenant ce qui m’a permis de me tenir proche d’amis et d’alliés naturels que sont Isabelle Ouimet (La royale électrique), Julien Manaud (Lisbon Lux Records), Analogue Addictions, Sexy Slots, Kapuano Records, Entreprise qui oeuvrent pour la même cause avec autant de ferveur et d’acharnement ! Je suis également gérante du groupe montréalais Corridor et viens de co-fonder l’etiquette Michel Records (avec Michel Aubinais) sur laquelle nous avons les fantastiques Corridor, Thin Blue Line… et la famille va bientôt s’agrandir 😉 On écoute! News From What We Once Thought by Thin Blue Line Quand avez-vous commencé à aimer la musique? Ma mère avait des bons vinyles mais je me rappelle surtout que le son était toujours trop fort à son goût haha… À 12-13 ans j’écoutais The Doors, Nirvana en passant par The Beatles, The Breeders, Michael Jackson, The Supremes … Mes goûts se sont vraiment affinés vers 19, 20 ans. À 20 ans, quel était votre rêve? Je souhaitais être directrice artistique et faire connaitre tous les petits groupes que je pouvais découvrir sur Myspace ou sur des blogues obscurs. Avez-vous été musicienne? Racontez-nous votre carrière. Non! J’ai fait des choeurs sur « Poison » par Hey Hey My My, le premier groupe avec lequel j’ai travaillé. Ils sont malgré tout restés de très bons amis… 😉 J’ai également fait des « hum hum » sur le titre « Lightmotiv » d’Austine, une belle âme, une voix magnifique et une superbe plume. J’adore les guitares façon Julie Doiron de cette version du titre. Grands moments de gloire… Ha! ha! Mais non, je n’ai pas cette ambition ni le talent. J’aime mieux travailler dans l’ombre avec des artistes que j’aime et qui font ça naturellement bien! SUR L’INDUSTRIE MUSICALE En vivez-vous? Aujourd’hui oui mais je n’en vis pas grassement. J’ai dû, de longues années, cumuler mon temps plein d’attachée de presse et des mi-temps dans la restauration et la vente. Est-il encore possible aujourd’hui de gagner sa vie dans l’industrie musicale? Que faut-il faire pour y arriver? Oui c’est possible d’en vivre. Aujourd’hui la principale source de revenus est l’édition après il y a également le spectacle et la gérance. Mais chaque cas est unique et a son lot d’exception… Le principal c’est avant tout de croire en ses projets, de se battre, de ne jamais baisser les bras… Et de ne pas compter ses heures! Quelle(s) rencontre(s) a(ont) été déterminante(s) dans votre carrière dans l’industrie musicale? Toutes les rencontres que j’ai faites m’ont menée là où je suis aujourd’hui, mais c’est vrai qu’à l’époque, Clarisse Fieurgant a su répondre à beaucoup de mes questions. Qu’aimez-vous dans votre emploi / occupation actuelle? Les gens qui m’entourent, être libre de mon temps, de faire mes propres choix, de défendre les artistes que j’aime et d’apprendre sans arrêt de nouvelles choses. Photo: Sara Anada Fleury Que changeriez-vous de l’industrie musicale d’aujourd’hui? Une très vaste question, mais la plus importante, et celle qui revient sans arrêt est celle du streaming et de la rémunération des artistes. Je pense également que le quasi-monopole des majors — qui, à coup de gros placements publicitaires et de négociations va décider de l’avenir d’un groupe plutôt qu’un autre et par la même occasion décider du goût des consommateurs — y est pour beaucoup… Un rapport de force bien inégal quand l’on est un artiste ou une étiquette indépendante. En ce sens, certains médias ne jouent pas suffisamment (selon moi) leur rôle de prescripteur et devraient davantage accompagner les curieux vers d’autres univers, choix, goûts. Quel grand rêve n’avez-vous pas encore accompli? Un tour du monde, m’enrichir de toutes ces cultures et travailler pour un organisme humanitaire. Le vinyle, la cassette, le CD ou le numérique? Je suis vinyle et numérique. C’est bien cool, les cassettes, mais je n’ai pas racheté de lecteur et pour le CD… J’aime moins l’objet, on ne peut plus en écouter sur les ordis et je n’ai pas de char. SUR LES ARTISTES ET LA MUSIQUE Vos styles de musique préférés? Est-ce que ç’a toujours été le cas dans votre vie? J’écoute surtout du art-rock, psyché, garage, punk, post punk. j’ai eu plusieurs périodes et j’ai aussi écouté beaucoup de Hip Hop. Sur une île déserte, vous emmèneriez ces 5 albums (pas plus). Je pense que le temps du jour va influencer ma réponse (il fait gris) mais je dirais, non sans hésitation : Paul McCartney – « McCartney II », John Parish & PJ Harvey – « Dance Hall at Louse Point », Cat Power – « The Cover Record », Velvet Underground – « Loaded », Pavement – « Brighten The Corners » Playlist! Quel est l’artiste le plus sympathique que vous ayez rencontré? J’ai vraiment eu de la chance, je suis toujours tombée sur de très chouettes artistes… Par contre, Demis Roussos m’a fait pleurer quand j’étais encore débutante haha… Qu’est-ce qui rend un artiste désagréable? C’est souvent l’entourage de l’artiste qui le rend désagréable… Quel artiste brillant aurait dû percer davantage, selon vous? Le groupe (de filles) Electrelane est absolument fabuleux et je suis si triste qu’il n’existe plus… Qui aimeriez-vous rencontrer? Des femmes marquantes : PJ Harvey, St-Vincent, Patty Smith Merci beaucoup Chloé! Pour suivre les activités de Chloé Legrand, suivez sa page Facebook ou son compte Twitter et consultez le site de Michel Records, en cliquant sur le logo ci-dessous! photo de profil : Sara Anada Fleury Réagissez à cet article / Comment this article commentaires / comments