Ceux et celles qui ont vu l’excellent film « 20 Feet From Stardom » qui raconte la vie des choristes (ce qu’on appelle des « background singers » dans le jargon), connaissent Darlene Love. L’expressive et souriante chanteuse américaine qui a aujourd’hui 74 ans a été choriste pour des grands noms comme Elvis Presley, Tom Jones, Sam Cooke, les Beach Boys et Dionne Warwick au début des années 60, en plus d’être l’une des principales voix des talents utilisés par Phil Spector, notamment avec The Blossoms et The Crystals (bien qu’elle n’était pas souvent créditée) à la fin des années 60. Elle a eu sa chance dans les années 80 mais ses albums solo n’ont jamais décollé des bacs.

 

Le téléphone ne sonnait plus. Darlene Love a ensuite lancé la serviette. Elle a gagné sa vie en appuyant des artistes ici et là, se spécialisant dans le gospel – ses amours de toujours – et les chansons de Noël. C’est d’ailleurs Darlene Love qui chante la version de U2 de Christmas (Baby Please Come Home). Elle chante chaque année au spectacle de Noël de David Letterman. Il l’avait d’ailleurs invitée à son émission en juin 2013 pour parler de sa carrière.

 

Le succès du film a sans doute donné l’envie aux producteurs de disques de redonner une chance à cette puissante chanteuse soul, en misant sur son triste parcours. C’est son complice de longue date Steven Van Zandt (aussi guitariste dans le E Street Band de Bruce Springsteen) qui l’a resignée sur son propre label. Le public aime les histoires de battants, de victoires improbables des « underdogs ». Ça sera de l’excellent matériel pour les médias, pour la faire venir chez Oprah et tout le tralala. Voici donc « Introducing Darlene Love », 23 ans après que son « The Best of » ait été publié.

Contrairement à une autre légende du soul, Mavis Staples, 76 ans, qui a bénéficié d’un beau coup de main de Jeff Tweedy, de Wilco, qui a réalisé son album “comeback” « One True Vine » en 2013, insufflant à sa carrière un nouveau souffle, Darlene Love se retrouve avec des chansons ordinaires, prévisibles, sans magie, sans rien d’étincelant. Little Liar, Among the Believers, Forgotten Nights sont toutes des chansons facilement oubliables. Malheureusement. Who Under Heaven a peut-être un peu plus de panache avec ses dynamiques arrangements orchestraux.

Le clip de la chanson Forbidden Nights comporte plusieurs caméos rigolos. Regardez ça.

 

C’est dommage parce qu’on sent que Love a une belle voix qui n’a rien perdu de sa puissance. Mais le style musical qui a été mis de l’avant sur ce disque a gardé le côté conservateur des années 70, sans vraiment mettre en valeur son talent. Le disque de Staples mettait de l’avant la richesse de la voix de la vétérane alors qu’ici, on a un album de pop rock gospel des plus communs. Je ne doute pas de la foi de Love ni de sa passion, mais on la sent trop peu transpercer les haut-parleurs. Souvent elle semble ensevelie sous les lourds arrangements (Nights Closing In aurait pu être épurée au lieu d’être si touffue, bon dieu…).

Au final, un album quelque peu décevant, sans l’étincelle qui aurait permis une véritable résurrection de la carrière de Darlene Love. C’est dommage.

DARLENE LOVE
Intoducing Darlene Love
(Wicked Cool Records, 2015)

-Genre: pop gospel
-Dans le même genre que Dionne Warwick, Bette Midler, Mavis Staples

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Mélomane invétéré plongeant dans tous les genres et époques, Nicolas Pelletier a publié 6 000 critiques de disques et concerts depuis 1991, dont 1100 chez emoragei magazine et 600 sur enMusique.ca, dont il a également été le rédacteur en chef de 2009 à 2014. Il publie "Les perles rares et grands crus de la musique" en 2013, lance le site RREVERB en 2014, et devient stratège numérique des radios de Bell Média en 2015, participant au lancement de la marque iHeartRadio au Canada en 2016. Il dirige maintenant la stratégie numérique d'ICI Musique, la radio musicale de Radio-Canada.