Durant ce 26e gala de la SOCAN, où étaient honorés les auteurs-compositeurs et éditeurs canadiens de la musique (souvent populaire, mais aussi classique, jazz) quelques bons jabs ont été lancés contre la superficialité de notre époque, et de son manque de vision. Plusieurs beaux hommages ont été rendus également. C’était la soirée de Gilles Vigneault à qui la SOCAN a remis le prix Empreinte culturelle, soulignant le fait que sa chanson Gens du Pays a profondément marqué la société canadienne. Effectivement, c’est sur cet air que les Québécois soulignent l’anniversaire d’un proche. La barre est haute pour les sélections futures! Les carrières de Pierre Létourneau et de Donald Tarlton (de la populaire entreprise de spectacles Donald K Donald) ont également été soulignées, tout comme le succès international d’Arcade Fire, qui n’était par contre pas sur place. Gilles Vigneault, avec Eric Baptiste de la SOCAN, sa fille Jessica Vigneault et Karl Tremblay, des Cowboys Fringants. Les revendications ont débuté avec l’unique Michel Pagliaro qui, en soulignant à quel point les paroles de sa chanson Les Bombes (nouveau classique de la SOCAN ayant atteint les 25 000 écoutes depuis sa création), étaient toujours d’actualité, n’a pas pu s’empêcher de trouver ridicules les artistes qui chantaient son tube sur la scène du Métropolis en dansant, comme s’il s’agissait d’une chanson joyeuse. Bon point, Pag. Pag Quelques minutes plus tard, le compositeur Denis Gougeon – récipiendaire du prix Jan V. Matejcek dans la catégorie nouvelle musique classique – a quant à lui plaidé pour la reprise des enregistrements des concerts, que Radio-Canada a abandonnés. Sa plus récente oeuvre, Création pour cor et orchestre, sera interprétée à la Maison symphonique demain et jeudi, par l’OSM, en première mondiale (infos ici). « C’est la mémoire de notre culture qu’on laisse tomber », déplore-t-il. Denis Gougeon Daniel Lavoie a placé une pointe politique en prétendant qu’il avait ajouté un couplet à son classique La villa de Ferdinando Marcos sur la mer (25 000 passages à la radio elle aussi). « En constatant que les trois protagonistes de ma chanson, Marcos, Reagan et Duvalier, étaient disparus, j’ai écrit quelques lignes sur Stephen Harper! » Rires dans la salle, en pleine campagne électorale. C’était aussi l’occasion de célébrer des auteurs méconnus comme Pierre Létourneau, qui a écrit des chansons pour Nanette Workman et Nicole Martin, en plus de signer 16 albums de son nom. L’auteur de Maurice Richard et À coeur ouvert, a reçu le prix Excellence pour l’ensemble de sa carrière. Il a parlé avec talent et beaucoup de sentiment de la fièvre d’écrire, de l’art d’écrire une chanson, du travail, de l’inspiration, du senti. Même ceux qui ne connaissent pas Pierre Létourneau ont sans doute craqué pour le sympathique artisan. « Vous avez devant vous un homme comblé, heureux même! ». Ça paraissait, bravo M. Létourneau. Pierre Létourneau De son côté, Geneviève Côté, chef des affaires du Québec à la SOCAN, y est allée d’un vibrant appel au front pour conserver le quota de musique francophone canadienne à 65 %, alors que les radios commerciales demanderaient au CRTC de l’abaisser à 35 %, changeant la donne pour les auteurs et compositeurs qui vivent en partie des droits récoltés lors de la diffusion de ses œuvres sur les ondes hertziennes. Plusieurs suivront ce dossier de près. Geneviève Côté, de la SOCAN Il faut déplorer les discours hésitants, voire vides, de plusieurs artistes lauréats, pourtant auteurs! Pas préparés, tentant maladroitement la carte de l’humour, ils se sont souvent emberlificotés dans leurs remerciements. Sans nécessairement causer de malaise, plusieurs n’ont pas dit grand-chose de compréhensible, voire d’intéressant… L’un d’eux improvise et nous raconte comment c’est le fun d’appeler son gestionnaire de droits au téléphone, composer le 1 pour atteindre son poste… D’autres avouent candidement ne pas s’être préparés et racontent n’importe quoi. Ouais. Bon. Certains ont par contre pris la peine de faire des remerciements bien sentis à des particuliers qui travaillent dans l’ombre pour le développement de leur carrière, les traqueurs radios et gens de relations de presse comme Stéfane Campbell, Junior Bombardier, Nat Corbeil, la gang de Torpille, des gens dont le travail, la rigueur et la persévérance sont essentiels à faire passer la musique à travers les médias. Un beau geste. Au niveau des interprétations sur scène, c’est d’après moi celle d’Antoine Corriveau, intime et intense, qui a été le moment le plus authentique de la soirée. Le décès récent d’André Lallier, pilier de l’industrie de la radio (CKMF, CHOM, Énergie) a été souligné avec beaucoup d’émotion par Madame Côté. Antoine Corriveau (photo: Alexandre Turcotte) La liste complète des gagnants se trouve ici. Toutes les photos de la soirée ici. Toutes les photos de cet article (sauf où indiqué) sont de Michel Gagné. Réagissez à cet article / Comment this article commentaires / comments