Il y a toute une nouvelle mouvance internationale qui fait que plusieurs artistes qu’on aurait jadis machinalement classés en “musique du monde” se rendent à nos oreilles Occidentales. Une modernité dans le son, avec peut-être une habitude de mondialisation en trame de fond, fait qu’on ne considère plus ces artistes comme “world” dans le sens qu’ils font de la musique africaine, sud-américaine ou magrébine, mais simplement de la musique blues, rock, groove, électro. Il n’y a plus de frontières!

Je pense à Amadou et Miriam, Emel Mathlouthi, Tinariwen, Sudan Archives (une Américaine qui fait de la musique soudanaise) et Ibibio Sound Machine, dont je veux vous parler aujourd’hui.

Bien que formée à Londres en 2013, cette formation composée de la chanteuse Eno Williams, du guitariste ghanéen Alfred Kari Bannerman (du groupe Konkomo), du percussionniste brésilien Anselmo Netto, du batteur Jose Joyette, du bassiste John McKenzie, du tromboniste et claviériste Tony Hayden, du trompettiste et claviériste Scott Baylis et du saxophoniste et également claviériste Max Grunhard, sonne comme si elle nous arrivait droit d’Afrique, avec ses riffs typiques de guitares électriques, et cuivres, comme sur I’m Running. Fela Kuti est clairement une influence majeure chez ses musiciens.

 

Initialement créé par les producteurs Grunhard, Leon Brichard et Benji Bouton en 2010, Ibibio Sound Machine est devenu un groupe lorsqu’est venu le temps de jouer sur scène. Le mélange des cultures amène une très riche variété dans les sons. Lorsque le ghanéen Bannerman lance des riffs de guitare bien distortionnée sur Uwa the Peacock, sur une basse bien roulée de McKenzie, et que le brésilien Netto s’en tient au triangle et œufs (shaking eggs) et grosse caisse électronique pour tenir le tout, la sauce prend. On est ailleurs!

La chanteuse Eno Williams a beau être née à Londres, c’est au Nigeria qu’elle grandit avec sa famille. Le nom du groupe vient d’ailleurs de sa langue maternelle, l’ibibio. Elle utilise cette langue ancienne sur “Uyai”, le second opus du groupe, pour exprimer des thèmes modernes, un autre clash intéressant.

 

Le jeu de basse de McKenzie est d’un groove irrésistible sur plusieurs morceaux, tels The Talking Fish, qui fait assurément bouger les hanches des clubistes. On n’est pas si loin de Deee-Lite par moments!

Le jeu de batterie de Joyette sur Prodigal Son est digne des meilleurs moments afrobeat du grand Tony Allen: ça groove, ça jazze, c’est complexe et accrocheur en même temps. La façon de chanter d’Eno Williams, saccadée et punchée, rappelle l’excellente Xenia Rubinos.

Got to Move! Got to Get Out! est mal nommée: c’est un morceau plutôt calme, un peu dans l’esprit de Morcheeba: un groove lent, une voix suave, des claviers aériens. Un autre beau contraste dans cet album riche et varié.

Voilà un disque fort et agréable à la fois. Des grooves qui vont assurément hypnotiser vos hanches, tout en gardant votre esprit de mélomane allumé, grâce à mille brillants détails. Un must de 2017.

ibibio sound machine - Uyai-Album

IBIBIO SOUND MACHINE
Uyai
(Merge, 2017)

-Genre: afrobeat groovy
-Dans le même genre que Thivery Corporation, Xenia Rubinos, Fela Kuti

Écoute et achat sur le site officiel du groupe
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Mélomane invétéré plongeant dans tous les genres et époques, Nicolas Pelletier a publié 6 000 critiques de disques et concerts depuis 1991, dont 1100 chez emoragei magazine et 600 sur enMusique.ca, dont il a également été le rédacteur en chef de 2009 à 2014. Il publie "Les perles rares et grands crus de la musique" en 2013, lance le site RREVERB en 2014, et devient stratège numérique des radios de Bell Média en 2015, participant au lancement de la marque iHeartRadio au Canada en 2016. Il dirige maintenant la stratégie numérique d'ICI Musique, la radio musicale de Radio-Canada.