À l’ère des concours télé, on constate que des chanteurs apparaissent et disparaissent en coup de vent. On assiste à de grandes joies en public et on devine (ou non) de grandes peines en silence. Ce n’est pas une grande nouvelle si je vous dis que le marché musical au Québec est saturé. Avec ces concepts télé, il pleut des chanteurs. De la bonne télé, c’est bien agréable à regarder pour le public, mais le rejet que vivent la plupart de ces chanteurs est bien réel.

Le danger

Pendant que certains profitent des avantages de cette belle et grande vitrine publique, plein de jeunes et moins jeunes chanteurs se remplissent la tête d’espoirs utopiques. Le marché musical est contingenté et il n’y a pas de place pour tout le monde. Ça, c’est sans parler du contexte musical des années 2000: vente d’albums en chute libre, diminution de l’audience dans les salles de spectacle, etc. En 2016, les cotes d’écoute des concours télé sont inversement proportionnelles aux ventes d’albums. Les gens paient de moins en moins pour la musique, that’s it. Comment feront les chanteurs de demain pour gagner leur vie en musique? On se le demande encore.

la voix suivez le parcours

Bref, le plus gros danger, c’est cet espoir qu’entretiennent les participants. La plupart vont le nier, question de s’auto protéger. On les entendra dire « je suis content de m’être rendu jusque-là, je l’ai fait pour le trip’ », mais je n’y crois pas. Sans nommer personne, je peux vous affirmer que plusieurs amis chanteurs qui ont participé à un concours télé ont pris toute une débarque lorsqu’ils ont été ‘flushés’ en bon québécois. Ces  chanteurs-là, ce ne sont pas des robots, ce sont des passionnés.

Qui sont les vrais gagnants?

1.    Les juges

Mine de rien, ils profitent d’une visibilité béton à toutes les semaines pendant des mois. Un aspect non négligeable pour entretenir ou augmenter sa crédibilité auprès du grand public, vendre les billets des spectacles ou des albums.

les juges La Voix

2.    Le diffuseur

Lui, il est content quand ses émissions frôlent les millions de cotes d’écoute. Le diffuseur a un but: vendre de la publicité. Explication rapide: plus  il a de bonnes cotes d’écoute, plus il vend de la pub, plus il fait de l’argent, plus il est content. Simple de même. Oui, c’est certain qu’il veut diffuser de bonnes émissions que les gens vont aimer parce que c’est comme ça qu’il fait rouler sa business.  Il fait du divertissement.

3.    Quelques chanteurs

Oui, certains chanteurs vont y gagner quelque chose pour vrai. Ils vont soit décrocher un contrat de disque ou augmenter leur crédibilité avec cette participation. Mais attention, un contrat de disque n’est pas un gage de succès. Une apparition et même une victoire dans un concours, c’est un succès instantané qui s’essouffle vite. Pour la majorité des participants, la popularité gagnée redescend aussi vite qu’elle est montée.

Parlons des chanteurs.

Quand j’entends des gens dire: « Ça va bien ses affaires, il est passé à La Voix! » Bon. Quoi répondre à ça. Être en finale  d’un concours télé́, est-ce que ça te donne un bon salaire annuel? Pas vraiment. Est-ce que ça te garantit un salaire décent l’année suivante? Non plus.

 

Des participants, il y en a pour tous les goûts et de tous les styles. Qui sont-ils selon vous? Je vous ai préparé mon petit top 3 des types de participants:

1.    Le petit nouveau ou le chanteur qui ne gagne pas sa vie avec la musique.
Il est hyper motivé. Il pleure. Il est ému. Son rêve devient réalité. Il veut chanter toute sa vie.

2.    Le chanteur d’expérience ou le chanteur qui gagne déjà sa vie comme chanteur.
Il est émotif aussi. Ça fait longtemps qu’il attend ça. Une reconnaissance publique. Il se dit, « Ça y est, c’est mon tour! »

3.    Le stratégique
Il a une raison précise pour être là. Il a un plan. Il sort son EP, son album et se sert de cette vitrine pour maximiser son impact publicitaire. C’est un petit ratoureux et il fait bien de l’être.

Je n’ai pas dressé de liste des noms de tous les chanteurs qui ont participé à une téléréalité au Québec depuis le début des années 2000, mais il y en a une tonne. Combien gagnent vraiment leur vie avec la musique? J’aimerais beaucoup le savoir. Si vous avez des statistiques véridiques sur le sujet, je suis preneuse.

19 chanteuses oubliees
Le 7 mars 2016, le site web du Journal de Montréal (dans sa section « Sac de chips ») publiait une liste de 19 chanteuses pop oubliées. Curieusement, aucune de ces chanteuses n’est passée par les émissions de télé diffusées à TVA, que ce soit Star Académie ou La Voix. Aux noms d’Eva Avila, Gabrielle Destroismaisons et Annie Major-Matte que l’article cite, on aurait pu ajouter bien des participant(e)s de concours télé dont on n’a plus jamais entendu parler.

Cette vidéo (en anglais) parle du formattage et de la dépersonnalisation de la musique pop d’aujourd’hui. Ça donne le contexte dans lequel devront évoluer les candidats à ces concours télé.

 

Si vous voulez poser un vrai geste pour encourager les artistes et que la musique soit gagnante, écoutez de la musique, achetez de la musique et allez voir les artistes en spectacle dans toutes sortes de contextes. Les cotes d’écoute dans les émissions du dimanche soir, ce n’est pas ça qui donnera à manger à long terme aux participants.

La télé réalité, c’est peut-être tout sauf la réalité?

Je termine sur une note très pastorale, mais ô combien importante à mes yeux.

Pour moi, le mot musique ne devrait jamais être associé à des mots compétitifs comme: duels, champs de bataille, mais plutôt à des mots qui font du bien, tels: rassemblement, aide et partage.

 

(captures d’écran prises sur le site de La Voix, 25 mars 2016)

 

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Blogueuse - RREVERB
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Artiste depuis toujours (chanteuse et danseuse professionnelle), Amira vit entourée de musique. Elle est amoureuse des mots et aime la rédaction, mais surtout l’écriture artistique. Elle est copropriétaire de IN VIA, une compagnie musicale à deux volets: un studio d’enregistrement et des spectacles. De plus, elle détient un baccalauréat en communication marketing et a aussi fait des études en musique de niveau collégial.