De manière spontanée, on associe le surf-rock aux plages, aux filles, aux autos, à la Californie et, évidemment, au surf. Vu de l’extérieur, ce style de musique pouvait même être considéré comme un mode de vie, un hédonisme luxuriant et insouciant, vécu là où le soleil brille toute l’année et où il fait bon vivre. Au-delà des clichés et des lieux communs, le surf-rock est avant tout une musique innovatrice et audacieuse qui a été jouée par de brillants musiciens. Plus de 50 ans après la fin de l’apogée du style, on peut affirmer que le surf-rock a bien vieilli, et continue de recruter de nouveaux adeptes année après année.

En rétrospective, le surf-rock a comblé, au tout début des années 60, un vide. Initié notamment par Elvis Presley, Chuck Berry, Bill Haley, Little Richard et Eddie Cochran, le rock ‘n’ roll était devenu une caricature de lui-même, alors que ses principaux protagonistes l’avaient déserté, ou étaient décédés. De fades chanteurs pop occupaient le haut des palmarès, tandis que Motown et les girl groups commençaient à se faire connaître. Les Beatles – et l’Invasion britannique qu’ils allaient déclencher – en étaient encore à fourbir leurs armes dans les salles de spectacle de Hambourg et de Liverpool.

Les musiciens du surf-rock ont donc tenté de relever bien haut le flambeau du rock. Inspirés par le jeu de guitare de Chuck Berry et par les envolées instrumentales des pionniers qu’ont été Link Wray et Duane Eddy, ils ont comblé le vide causé par la mise au ban du rock. Ils n’ont cependant pas du tout tenté de recréer les tubes des Elvis et compagnie. Ils ont certes repris des éléments du rock standard, dont l’instrumentation et la rythmique, mais y ont ajouté une guitare pleine d’écho et de réverbération. De plus, la guitare solo était très souvent jouée en arpèges rapides plutôt qu’en accords plaqués. Dick Dale, le grand pionnier du surk-rock, a aussi introduit des influences de la musique mexicaine, moyen-orientale et arabe. Une musique en apparence simple cache ainsi de grandes innovations, qui ont certainement influencé plusieurs générations de musiciens.

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Dick Dale

On attribue à Dick Dale le premier tube avec l’instrumentale Let’s Go Trippin’, qui a eu un grand succès en Californie en 1961. Dick Dale, avec ses Del-Tones, a récidivé l’année suivante avec la classique Misirlou, reprise par à peu près tous les groupes surf-rock. Dès lors, la porte était ouverte pour tous les autres musiciens inspirés par l’esprit jeune et libre de la musique, et dont les sons de guitare rappelaient les vagues de l’Océan Pacifique. The Bel-Airs, The Chantays, The Surfaris, The Ventures, The Lively Ones et The Challengers ont suivi les traces du Roi de la guitare surf avec une musique largement instrumentale.

La branche vocale du surf-rock, bien que quelque peu minoritaire, est toutefois la plus connue du lot. The Beach Boys ont évidemment été la figure marquante du surf-rock vocal. Même si seulement Dennis Wilson, le batteur, faisait du surf, l’imaginaire et la thématique du surf, des voitures et des plages ont imprégné leurs six premiers albums. Plusieurs excellentes pièces instrumentales se sont retrouvées sur ces opus, mais ce sont surtout les classiques Surfin’ U.S.A., Surfer Girl, Surfin’ et Catch A Wave qui ont marqué les esprits.

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The Beach Boys

The Beach Boys étaient eux aussi inspirés par le jeu de guitare de Chuck Berry (Surfin’ U.S.A. contient d’ailleurs un emprunt à Sweet Little Sixteen, de Berry). L’élément distinctif de leur style était cependant les sublimes harmonies vocales à quatre, qu’on pouvait surtout retrouver dans le doo-wop jusqu’alors. D’autres groupes ont aussi eu un succès considérable, dont Jan & Dean, duo californien dont les tubes Surf City, Dead Man’s Curve et Drag City ont été coécrits par Brian Wilson, des Beach Boys.

Le surf-rock a malheureusement été mis au rancart par l’« exotisme » de la British Invasion (même si les groupes anglais ne faisaient souvent que reprendre des standards de blues américain…). Les groupes qui n’ont pas su s’adapter ont disparu comme ils sont apparus, mais certains ont pu survivre. Le genre est ensuite demeuré restreint aux spectacles étiquetés « 60’s oldies ». Puis le surf-rock est ressuscité au début des années 90, grâce à la trame sonore du classique Pulp Fiction, de Quentin Tarantino, qui contenait plusieurs pièces de surf-rock, dont Misirlou de Dick Dale.

Afin de découvrir cette incroyable genre musical, j’ai préparé une liste de lecture contenant 40 chansons, avec autant des pièces instrumentales que de surf vocal.

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Blogueur - RREVERB
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Curieux de nature, Benoit est un boulimique musical qui consomme de presque tous les genres. Du punk au classique, en passant par le folk, le psychédélique et le rockabilly, il sait apprécier les subtilités propres à chacun de ces courants musicaux. À travers des centaines d'heures d'écoute et de lecture de biographies, il tente de découvrir les motivations et les secrets derrière les plus grands albums et les œuvres grandioses des derniers siècles. Il parcourt aussi les salles de spectacle de Montréal, à la recherche de vibrations directes.